Dans cet article, je vais vous expliquer comment vérifier si vous tombez en dessous du seuil « fatidique » de la moitié du capital et surtout, quelles solutions face à une perte supérieure au capital, ou plutôt à la moitié du capital.

Calculer la perte supérieure au capital/ à la moitié du capital

Allergiques à la comptabilité, ne fuyez pas : le calcul est simple ! En fait, il ne s’agit pas de la perte de votre dernier exercice, mais du montant des capitaux propres que l’on compare au capital social.

Voici les éléments dont vous avez besoin pour calculer si votre société fait face à une perte supérieure à la moitié du capital :

a = capital social
b = report à nouveau & réserves (les résultats des exercices passés, diminués des éventuels dividendes)
c = les subventions d’investissement (diminuées de leur reprise)
d = perte de l’année

Il y a « perte supérieure au capital », ou plutôt « perte supérieure à la moitié du capital », si les capitaux propres (soit a+b+c+d) est inférieure à la moitié du capital social, soit a/2.

Exemple de perte supérieure à la moitié du capital

Le capital social de l’entreprise XYZ* est égal à 1000 Eur. (*pour les fans de City Hunter)
La première année, XYZ enregistre une perte de 400 Eur. La seconde année, une perte de 200 Eur.
Les capitaux propres de XYZ sont de : 1000 Eur -400 Eur -200 Eur = 400 Eur.

La moitié de son capital social est de 500 Eur : 1000 Eur/2.

Donc XYZ a une perte supérieure à la moitié du capital : les capitaux propres de 400 Eur sont inférieurs à 500 Eur, la moitié du capital social.

Si vous avez un doute sur votre calcul, demandez à votre expert comptable.

Le compte courant associé ne rentre pas dans le calcul de la « perte supérieure au capital »

Souvent, l’entrepreneur avance de l’argent à la société en payant certains achats ou des frais qu’il ne se fait pas remboursé de suite. Cela peut-être aussi une avance par l’associé quand la société rencontre des difficultés de trésorerie ponctuelles et que la banque ne suit pas (ou est trop chronophage à saisir pour demander une ligne de tréso). Ces sommes constituent le compte courant associé. D’ailleurs, je vous conseille d’encadrer cette avance consentie à la société par une convention de compte courant d’associé, même si vous êtes associé unique et dirigeant. De plus, vous devez faire une déclaration aux impôts (voir mon article sur le compte courant d’associé pour les précisions).

Le compte courant associé est une avance consentie à la société par un associé détenant au moins 5% du capital social de la société. C’est donc une dette de la société envers un associé.
Même si le compte courant associé est bloqué (souvent à la demande d’une banque ou organisme de financement quand il prête), il est comptabilisé en bas de bilan (avec les emprunts, les dettes fournisseurs…) et non pas en fonds propres (= haut de bilan).

De l’intérêt de piloter son activité !!

Si vous avez l’impression que le résultat risque d’être une perte (parce que vous encaissez moins de chiffre d’affaires, que votre trésorerie est tendue…), je vous conseille en fin d’année, avant votre clôture, de faire une estimation de votre résultat comptable et de votre bilan. Si vous utilisez un logiciel de comptabilité, vous pouvez générer un bilan et compte de résultat provisoires.

Les écritures de fin d’année ne sont pas passées, mais vous pouvez faire une estimation grossière et voir où vous en êtes.

Souvent les écritures de fin d’année sont : les écritures de stock (valorisation de votre stock), d’amortissement de vos immobilisations (ordinateur ou matériel professionnel) et de subventions le cas échéant.

Vous pouvez demander un rendez-vous à votre expert-comptable pour faire le point : cela lui permet aussi de préparer la revue des comptes.

Quelles obligations suite à des fonds propres inférieurs à la moitié du capital ?

Dans les 4 mois qui suivent l’AG d’approbation des comptes où est constatée cette perte, il est nécessaire de convoquer une AGE (SAS/SARL). Si c’est une SASU / associé unique, une décision unique d’associé suffit.

Les associés / l’associé doivent décider entre la dissolution de la société ou la poursuite de l’activité de la société. Dans le premier cas, c’est la fin de la société avec la dissolution…

Dans le second cas, cela implique la publicité de la situation de la société et de la décision prise, … des frais associés à ces publicités et une image qui se dégrade auprès des partenaires, clients et fournisseurs. En effet, la décision de l’AGE ou de l’associé unique doit faire l’objet d’une annonce légale publiée et doit être déposée au greffe du tribunal de commerce. La perte de la moitié du capital est inscrite sur le K-bis …

L’épée de Damoclès est toujours sur la société car elle a deux exercices pour remonter la pente et reconstituer ses fonds propres. Sinon, c’est la dissolution … Et en pratique, l’AGE a lieu dans les 4 mois suivant l’AG d’approbation des comptes, donc pour une clôture au 31/12, cette AGE doit avoir lieu avant fin octobre. Ensuite, les associés doivent prendre du temps pour ce formalisme et agir pour redresser la barre… Donc le délai de 2 exercices ressemble plus à un seul exercice en pratique…

Concrètement, on préfère éviter d’arriver à cette situation de perte de moitié du capital… Le formalisme est lourd, la publicité n’est pas très bonne…

Si vous n’avez néanmoins pas d’autre alternative, le formalisme de ce type de situation est particulier. Et le conseil que je souhaite vous transmettre est de ne pas perdre trop de temps à essayer de faire les différents documents juridiques seul car vous devez garder TOUTE VOTRE ENERGIE intacte pour remonter la pente…et le temps est compté…

Demandez à votre expert-comptable le coût pour vous accompagner. Pour ma part, je préfère aller sur des sites qui sont moins onéreux que l’expert-comptable, plus réactifs et spécialisés comme Legalstart.

Quelles solutions face à une perte supérieure au capital ?

La solution la plus évidente est l’augmentation de capital parce qu’entre les paramètres a, b, c et d, c’est celle sur laquelle on peut intervenir de façon mécanique. Cependant, une augmentation de capital nécessite de faire rentrer de l’argent frais, sauf si on transfère du compte courant associé vers le capital social. Et en tout état de cause, cette opération nécessite une AG, des publications, mentions au greffe…

Mon expert-comptable m’avait soufflé une autre bonne idée : l’abandon de compte courant avec clause de retour à meilleure fortune. Concrètement, vous avez déjà un compte courant associé et vous abandonnez une partie ou la totalité de votre créance à la société : pour la société, c’est un produit exceptionnel qui va intervenir sur le résultat de l’exercice en cours (le « d » de notre équation). La clause de retour à meilleure fortune permet de récupérer l’argent dès que la société a retrouvé un niveau de capitaux propres satisfaisant.

Car l’inconvénient de l’augmentation de capital, c’est que cela représente des frais de publicité, une procédure à respecter qui peut être lourde quand il y a plusieurs associés, un accord pour augmenter le capital entre associés et un caractère irréversible par rapport à l’abandon de compte courant associé.

Concrètement, j’avais préparé et signé une convention d’abandon de créance en compte courant avec retour à meilleure fortune. Pareil, si vous n’avez pas de modèle, demandez à votre expert-comptable ou allez faire un tour sur internet, ou sur un site comme Legalstart.

Face à une perte supérieure à la moitié du capital, le plus important : remonter la pente!

Les pertes dans une société ne sont pas en soi un échec, ou une situation catastrophique si vous avez anticipé ces difficultés et avez mis en place des mesures pour redresser la barre.

Pour anticiper les difficultés et mettre toutes les chances de votre côté, il y a de mon expérience d’entrepreneur, deux facteurs-clé de réussite : un tableau de bord simple et efficace pour ne pas découvrir les chiffres en avril ou mai ET ne pas rester seul. Pour ne pas rester seul, vous pouvez vous faire accompagner par un réseau type la BGE, et/ou trouver un ou des partenaires entrepreneurs avec qui échanger régulièrement dans un climat de bienveillance.