En tant qu’e-commerçant, je me suis d’abord interrogée sur le champ de la loi Hamon et notamment sur les exceptions sur les produits hygiène et cosmétique. Je vous fais partager mes recherches et mon analyse sur l’ensemble des exceptions au droit de rétractation loi Hamon.
Pourquoi ce focus sur les produits hygiène & cosmétique ? Car c’est près de la moitié du catalogue de mon site e-commerce (aujourd’hui fermé).
Pour l’e-commerce, la loi Hamon concerne les transactions B2C (business to consumer ; vente aux particuliers) et pas B2B (vente aux professionnels).
Date d’entrée en vigueur de la loi Hamon : toutes les transactions réalisées à partir du 14 juin 2014.
Comme en lisant les différents articles publiés sur la loi Hamon et le droit de rétractation nouvelle formule, je n’arrivais pas à savoir ce qu’il en était exactement, je me suis plongée dans la lecture de la directive européenne 2011/83/CE sur les droits des consommateurs et la loi Hamon qui en est la transposition globalement fidèle.

Je précise que je ne suis pas juriste et que je vous donne ma lecture / ce que j’ai pu comprendre de la réglementation sur le droit de rétractation. Une lecture croisée avec le guide UK sur cette directive m’a apportée un éclairage plus concret.

Voici mon analyse:

1. Rappel de la réglementation sur les exceptions au droit de rétractation

La loi Hamon modifie le Code de la Consommation sur ce point en son article L. 121-21-8 (que vous pouvez retrouver sur le site Legifrance).

Que dit la loi Hamon sur les exceptions au droit de rétractation ?
Le droit de rétractation ne peut être exercé par le consommateur pour les contrats :
« 1° De fourniture de services pleinement exécutés avant la fin du délai de rétractation et dont l’exécution a commencé après accord préalable exprès du consommateur et renoncement exprès à son droit de rétractation ;
« 2° De fourniture de biens ou de services dont le prix dépend de fluctuations sur le marché financier échappant au contrôle du professionnel et susceptibles de se produire pendant le délai de rétractation ;
-> sont donc exclus du bénéfice du droit de rétractation les produits sujets à investissement et spéculation, comme certains vins (millésimes,…).
Les contrats de fourniture de gaz ou d’électricité ne sont pas couverts par cette exception.
« 3° De fourniture de biens confectionnés selon les spécifications du consommateur ou nettement personnalisés ;
-> par nettement personnalisés, la jurisprudence viendra probablement affiner.
Autant il est clair qu’un vêtement, du linge de maison brodé à demande avec un prénom, des initiales ou un message sera nettement personnalisé, comme tout bijou gravé ou un livre personnalisable et personnalisé.
Mais aussi, il est possible de personnaliser sa paire de chaussures de running en choisissant les couleurs des bandes, de la semelle intérieure, ou des lacets…
Je pense que la question pour savoir si c’est nettement personnalisé est de savoir si l’e-commerçant pourra recommercialiser le produit une fois retourné par le client.
Le guide UK donne un exemple avec un canapé. Si le client a choisi le tissu et la couleur parmi la sélection du vendeur, cela ne sera pas considéré comme pouvant bénéficier de l’exception. Tout comme un ordinateur constitué de composants proposés dans l’offre sur le site du vendeur et sélectionnés par le client (je pense par exemple aux ordinateurs Dell). Cependant, pour revenir au canapé, si le client demande une finition spéciale qui ne fait pas partie de l’offre généralement proposée par le vendeur, cela pourra être considéré comme confectionné à demande et donc bénéficiant de l’exemption.
Un moyen de se prémunir des litiges avec les clients est aussi d’être explicite dans les CGV, la FAQ, en rappelant que la personnalisation du produit implique l’impossibilité pour le client de se rétracter.
« 4° De fourniture de biens susceptibles de se détériorer ou de se périmer rapidement ;
On pense à tout ce qui est produit ultra-frais (DLU d’une dizaine de jours), frais. Le « rapidement » risque aussi de faire l’objet de discussions et d’une jurisprudence. Est-ce que les produits devant respecter la chaîne du froid (surgelés) sont aussi concernés ? en raison des risques de santé en cas de recommercialisation par l’e-commerçant.
« 5° De fourniture de biens qui ont été descellés par le consommateur après la livraison et qui ne peuvent être renvoyés pour des raisons d’hygiène ou de protection de la santé ;
-> c’est l’alinéa qui concerne les produits santé, hygiène et cosmétique. Je le traiterai plus en détail après cette exception au droit de rétractation.
« 6° De fourniture de biens qui, après avoir été livrés et de par leur nature, sont mélangés de manière indissociable avec d’autres articles ;
-> je ne vois pas de quel type de produit il peut s’agir. Si vous avez des exemples, je suis curieuse.
« 7° De fourniture de boissons alcoolisées dont la livraison est différée au-delà de trente jours et dont la valeur convenue à la conclusion du contrat dépend de fluctuations sur le marché échappant au contrôle du professionnel ;
« 8° De travaux d’entretien ou de réparation à réaliser en urgence au domicile du consommateur et expressément sollicités par lui, dans la limite des pièces de rechange et travaux strictement nécessaires pour répondre à l’urgence ;
« 9° De fourniture d’enregistrements audio ou vidéo ou de logiciels informatiques lorsqu’ils ont été descellés par le consommateur après la livraison ;
-> cette exception au droit de rétractation existait déjà.
« 10° De fourniture d’un journal, d’un périodique ou d’un magazine, sauf pour les contrats d’abonnement à ces publications ;
En effet pour les contrats d’abonnement, la rétractation est possible dans les 14 jours suivant la réception du premier produit (journal, magazine…). Je ferai un article sur les subtilités de l’exercice du droit de rétractation.
« 11° Conclus lors d’une enchère publique ;
-> les ventes sur ebay ne sont pas couvertes par cette exception au droit de rétractation, le particulier devant être en mesure d’assister physiquement à la vente publique (cf. guide UK).
« 12° De prestations de services d’hébergement, autres que d’hébergement résidentiel, de services de transport de biens, de locations de voitures, de restauration ou d’activités de loisirs qui doivent être fournis à une date ou à une période déterminée ;
-> tout ce qui concerne le tourisme au sens large
« 13° De fourniture d’un contenu numérique non fourni sur un support matériel dont l’exécution a commencé après accord préalable exprès du consommateur et renoncement exprès à son droit de rétractation.
-> ebooks, video en ligne, musique en ligne.

2. Les produits cosmétique et hygiène et droit de rétractation

La loi Hamon précise que les biens qui ont été descellés par le consommateur après la livraison et qui ne peuvent être renvoyés pour des raisons d’hygiène ou de protection de la santé sont exclus du droit de rétractation.

Les produits qui ne peuvent être renvoyés pour des raisons d’hygiène ou de protection de la santé : quels types de biens ?

Je pense aux cosmétiques, les produits d’hygiène comme certains dispositifs médicaux (spray pour nettoyer le nez, …).

3. Impact pour l’e-commerçant sur ces exceptions : faut-il sceller les cosmétiques et produits d’hygiène avant envoi au client ?

Souvent, les cosmétiques et les dispositifs médicaux achetés auprès des laboratoires ne sont pas scellés…

Les produits scellés par le fabriquant

Lorsque le produit est scellé par le laboratoire, en tant que revendeur, tout va bien ! A condition que la façon dont le produit est scellé ne permette pas d’être descellé et rescellé par le client. Est-ce que les vignettes transparentes sont satisfaisantes ? pas sûr…

Les produits hygiène et beauté non scellés

Pour les produits non scellés, les alternatives pour l’e-commercant sont les suivantes :
sceller le produit soit sur le stock, soit au moment de la préparation de la commande pour bénéficier de l’exception au droit de rétractation
envoyer un produit non scellé, en courant le risque d’avoir un retour du produit. Or un produit d’hygiène ou cosmétique qui est retourné sans avoir été scellé, a probablement été ouvert par le client.
Il me semble à tout le moins délicat dans ce cas de le remettre dans le circuit de vente pour le recommercialiser.
La décision entre ces alternatives dépend de l’impact financier pour l’e-commerçant :
sceller le produit : prix de l’étiquette de sécurité + scellage par une personne (du temps homme)
un retour produit non scellé : lorsqu’il y a une rétractation, l’e-commerçant enregistre déjà une perte car il doit rembourser les frais de port d’envoi (frais « aller ») au client. Dans ce cas, il perd en plus le prix d’achat du produit.
Cela dépend d’une part, du % de retours que vous avez aujourd’hui (je ne suis pas sûre que le droit de rétractation version loi Hamon change le % de retours produits), du prix d’achat du produit (maximum ou moyen) et d’autre part, du nombre de produits à sceller x prix étiquette sécurité x temps homme. Sachant que la réalité avec une rétractation sur un produit cher peut faire basculer vos calculs…
Une piste de progrès est de limiter le % de rétractation sur vos ventes. Et cela passe par une fiche produit la plus complète possible, des photos de qualité…

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